dimanche 31 octobre 2010

Tarek Aziz, vous connaissez ?





L'injustice suit son cours!
On oblige les aveux et on faire taire ceux qui savent.



Je me souviens de ce diplomate irakien. Je me souviens de ses interventions très sensées à l’ONU. Je me souviens de sa volonté à vouloir négocier de bonne foi.
Je me souviens qu’il était chrétien.
Je me souviens que le "régime" de Saddam était "laïc".

L’injustice internationale a atteint un nouveau sommet hier.
Deux événements à faire vomir:
l’obligation de plaider coupable du jeune Omar Khadr et la condamnation à mort de ce chrétien, Tarek Aziz qui s’est rendu volontairement aux «autorités» des USA.

Nos médias rapportent sans même froncer le front sans même un léger sourcillement désapprobateur. Dire qu’on se gargarise allègrement avec le prix politique Nobel de la paix 2010 (Liu Xiaobo - ndlr - lire: http://e-s-g.blogspot.com/2010/10/aux-naifs-qui-pensent-encore-que-les.html) qu’on veut faire libérer...

Dire qu’on se gargarisait allègrement des allégations de mauvaise volonté du président du Honduras, cet élu qu’on a renversé par les armes et qu’on disait à vous en faire vomir qu’il était "déchu"

Dire qu’on se gargarise de prisonniers "politiques" à Cuba pendant que sur un territoire honteusement occupé par des forces étrangères sur cette même île, on retrouve, au grand jour, un des pires camps de prisonniers politiques de la planète. Un camp où l’on emprisonne un enfant, où l’on torture et où la justice la plus élémentaire n’a plus cours.

Dire qu’on s’acharne sur les Mugabe, Chávez, Fernandez (Kirchner), Ortega, Correa, Poutine, etc. et qu’on rapporte, sans broncher, l’élimination de cet Humain, Tarek Aziz.

C’est la justice "irakienne" dira-t-on.
Voyons, l’Irak n’existe plus! Il y a un gouvernement d’apparence tout au plus. C’est l’injustice de l’empire US qui prévaut.

On a décidé rapidement d’éliminer Tarek Aziz parce que celui-ci, tout comme Saddam Hussein, peut en dire trop. Il pourrait corroborer les documents "secrets" divulgués par Wikileaks. http://wikileaks.org/iraq/diarydig

Et pour le jeune Khadr, maintenant devenu un Homme après avoir vécu 8 ans dans ce camp de concentration, après avoir été torturé et brisé, on le force par un vil chantage à avouer une culpabilité qu’il a toujours niée.

Ça me rappelle les aveux de Khaled Cheikh Mohammed.
Après avoir été savamment cuisiné, Kahled Cheikh Mohammed, tout comme Omar Kadr, a avoué tout ce que ses bourreaux voulaient:
“J’ai été responsable de l’opération du 11 septembre de A à Z” a-t-il dit.
Et même de tous ces complots des 15 années précédentes.
Il a dit être membre en règle d’Al-Qaïda.
Il a dit être de l’organisation terroriste ayant perpétré le premier attentat à la voiture piégée au World Trade Center en 1993.
Khaled Cheikh Mohammed a également reconnu son implication dans la planification de l’attaque d’une station balnéaire fréquentée par des Israéliens au Kenya en 2002 et l’attaque au missile ratée d’un avion de ligne israélien après le décollage de Mombasa au Kenya. Il a aussi endossé la responsabilité de l’explosion de la boîte de nuit à Bali, en Indonésie en 2002.

Est-ce suffisant?
NON

Il a déclaré avoir planifié des tentatives d’assassinat contre les anciens présidents américains Jimmy Carter et Bill Clinton, des attaques contres des centrales nucléaires américaines et des ponts suspendus à New York, la destruction d’ambassades américaines et israéliennes en Asie et en Australie, des attaques contre des navires de l’armée américaine et des pétroliers à travers le monde et une tentative de destruction d’une compagnie pétrolière appartenant à Henry Kissinger à Sumatra, en Indonésie.

Est-ce suffisant?
NON

"I decapitated with my blessed right hand the American Jew, Daniel Pearl in Karachi."
Oui, il a même avoué avoir décapité lui-même, avec sa main droite bénie, le juif américain Daniel Pearl. Ce journaliste d’enquête qui fouillait un peu trop sur les liens entre l’ISI pakistanais et la CIA.

Il aurait aussi eu des liens avec Richard Reid qui voulait abattre un avion transatlantique le 22 décembre 2001. Ce Britannique à bord d’un vol Paris-Miami de la compagnie American Airlines qui a tenté d’allumer des explosifs cachés dans ses semelles de souliers.

Mohammed, qu’on dit être le numéro 3 d’Al-Qaïda, s’est déclaré responsable de la préparation de 28 attaques individuelles, dont plusieurs n’ont jamais été exécutées.
26 pages d’aveux publiées par le Pentagone.
http://www.defense.gov/news/transcr...

Après tous ces aveux, on pourrait dire: "Un chausson aux pommes avec ça ?"
Oui, on oblige les "aveux".
Oui, on fait taire ceux qui savent, les témoins, les acteurs:
Saddam, cet ancien allié US était une menace pour les blancs américains (dans le sens pur et non ethnique) .
Tarek Aziz est aussi une menace.
En 2007, il disait être à la rédaction de ses mémoires et demeurait confiant d’être un jour libéré. http://www.palestine-solidarite.org/analyses.Tarek_Aziz.010407.htm
Voici des extraits de l’entrevue:
Lokman Iskender: Vous êtes en prison depuis 4 ans. Est-ce que vous vous attendiez à cela?
T.A: Non, mais pour ma famille, j’accepte tout, même d’y rester 15 ans.
Q: avez-vous regretté de vous être livré aux américains en échange du départ de votre famille?
Tarek Aziz: nullement!
Q: Mais ils vous ont détenu 4 ans sans la moindre inculpation.
T.A: Le départ de ma famille était prioritaire pour moi. D’autre part, mes chances de pouvoir me cacher en Irak étaient très faibles. Je suis très connu en ma qualité de diplomate et j’avais dans l’idée qu’il valait mieux me rendre aux américains que d’être arrêté par les Irakiens. Ceci me donne l’occasion en tout cas d’écrire l’histoire véritable de l’homme Saddam, de l’Irak et de ses relations étrangères depuis les années quatre-vingt-dix jusqu’à nos jours.  
Q: On a annoncé le 15/03/07 que l’Irak allait étudier sérieusement l’abolition de la peine de mort.
T.A (en rigolant): Oui maintenant qu’ils ont fait ce qu’ils voulaient [pendre Saddam, ndlr], ils peuvent abolir la peine de mort!
Q: Avez-vous commencé la rédaction de vos mémoires?
T.A: Oui.
Q: Est-ce qu’il y aurait des détails à nous fournir à ce sujet?
T.A: Plus tard! Plus tard!

Plus tard! Plus tard!
Ce sera évidemment trop tard. Tarek Aziz, cet Homme qui en savait trop se baladera au bout de sa corde.
Nos médias moraux nous parleront de justice!
Nos braves éditorialistes si prompts à condamner la Chine, Cuba, la Russie, le Venezuela, le Zimbabwe, l’Iran, ne s’offusqueront pas de ce geste dégoulinant de l’injustice la plus totale.
Il faut voir le bulletin de nouvelles de FR2 du 13 février 2003
À la suite de quelques reportages, Monsieur Tarek Aziz est en direct de Rome, à la veille de sa rencontre avec le pape, avec l’animateur de l’émission: http://www.ina.fr/video/2217897001/20-heures-le-journal-emission-du-13-fevrier-2003.fr.html

Nous savons tous maintenant que les États-Unis mentaient honteusement au monde entier afin de justifier l’invasion qu’ils s’apprêtaient à faire (impunément).
Ce bulletin de nouvelles du 13 février 2003 est sérieusement à voir.
Il faut vraiment réfléchir sur la mémoire sélective de nos médias de masse qui nous aiguillent allègrement l’opinion.

De plus, la construction de la peur collective est aussi très intéressante à analyser.
Le coup du Vénézuélien arrivant de Bogota (Colombie) avec une grenade pour commettre un attentat à Londres est «remarquable». Il faut voir, avec le recul des années, avec les mensonges connus et dénoncés, avec les budgets militaires votés et utilisés, avec l’occupation du Moyen-Orient, avec les manœuvres militaires actuelles et leurs justifications plus que louches, ce bulletin. En plus d’être une superbe leçon d’Histoire, il nous fait la démonstration de l’utilisation du sentiment de peur.

Si nos journalistes étaient plus éveillés, il serait intéressant de lancer une enquête sur cet homme (vénézuélien) qui arriva à Londres en février 2003, avec une grenade dans ses bagages. Pourquoi donc? En tout cas, c’est très efficace pour entraîner la peur collective du terrorisme qui menace (!). Jugez par vous-mêmes. Ce même scénario est employé régulièrement. On craint tous le terrorisme et on approuve donc cette guerre contre les ennemis terroristes invisibles et omniprésents.

Bonnes réflexions.
Quelle tristesse pour Omar Kadr et pour Tarek Aziz !
L’injustice suit son cours !

Serge Charbonneau
28.10.10
À lire:
Entrevue avec Tarek Aziz le 5 août 2010: http://www.guardian.co.uk/world/201...
Iraq’s Tariq Aziz Tells Dan Rather About Al-Qaeda In Iraq (2002) http://www.rense.com/general28/alaq.htm
Tarek Aziz à l’ONU
Qui donc étaient les menteurs???
Nous le savons tous, mais nos médias moraux nous le font oublier quotidiennement. Une HONTE! http://www.ina.fr/politique/politiq...
Tarek Aziz à l’Élysée: http://www.ina.fr/politique/politiq...
Tarek Aziz un allié des ÉU lors de la guerre contre l’Iran: http://www.ina.fr/histoire-et-confl...
[1] Pentagon Releases Audio of Khalid Sheikh Mohammed Testimony: http://www.foxnews.com/story/0,2933,296695,00.html
Khaled Cheikh Mohammed passe aux aveux: «J’ai été responsable des attentats du 11 septembre»
http://www.tunisia-today.com/archiv...

samedi 30 octobre 2010

Le racisme bien à l'œuvre dans l'entité sioniste que l'Occident défend...




En Israël, c'est l'heure de s'en prendre une nouvelle fois aux Arabes



Sous chaque chose il y a la haine, la haine et le mépris pour les Arabes. L’idéologie de la droite est morte depuis un certain temps, rien ne subsiste de sa gloire ancienne; ses sentiments primitifs sont devenus sa véritable force agissante. C’est ce que cachent les lois nationalistes de la droite et sa soi-disant «paix». Menaçant sous tous ses propos détestables, ce ne sont pas tant des considérations politiques que l’absence de toute conception méthodique, rien que des instincts sombres et dangereux.

Il y a crime de haine «quand son auteur a choisi sa victime en raison de son appartenance supposée à un certain groupe social, généralement défini comme groupe de race, de religion, d’orientation sexuelle, de handicap, de classe, d’ethnicité, de nationalité, d’âge, de sexe, d’identité sexuelle ou d’affiliation politique» (Wikipédia, citant Rebecca Stotzer). La plupart des crimes de haine visent des membres de minorités, il en est de même avec la dernière législation proposée.

Ne vous laissez pas abuser par les pseudos idées. Certes, elles sont porteuses d’aversion, elles ne manquent pas de racisme ni de nationalisme, mais à l’origine, il y a la haine des Arabes. Du Premier ministre Benjamin Netanyahu au député Danny Danon, du ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman à la députée Anastassia Michaeli, du député Michael Ben Ari au député Yaakov Katz, - tous, tous ont la haine de l’Arabe, publiquement ou non. La plupart n’ont même jamais rencontré un Arabe, mais ils savent tout d’eux. Pas un seul n’a même commencé à penser que les Arabes pourraient être les égaux des juifs.

Netanyahu entoure sa haine et sa condescendance d’un amour mielleux de la nation, Katz d’un amour creux de la terre. Mais ça n’a rien à voir avec l’amour. La seule chose qu’ils essaient de faire, c’est de dissimuler ce qui est à son opposé. Derrière leurs initiatives, enveloppées dans les drapeaux de la nation juive, grouillent leur haine et leur prétendue souveraineté. Ils savent, à leur grand dépit, que les Arabes sont ici pour toujours, malgré toutes les mesures qu’ils pourraient prendre contre eux. La seule explication pour ces actions des législateurs, c’est qu’ils donnent libre cours à leur plus cher désir.

Pensent-ils que leurs lois haineuses vont modifier la conscience du peuple arabe? Que les Arabes se déclareront «loyaux» envers Israël, et qu’ils seront loyaux? Que cela les empêchera de commémorer la Nakba et fera d’eux des sionistes? Qu’avec leurs maisons démolies, ils seront des serviteurs dévoués? Qu’ils reconnaitront l’Etat comme Etat juif et qu’ils renonceront à leurs aspirations?

Les check-points de la police des frontières nouvellement installés à Lod (et pas à Netanya qui est rongée par le crime, par exemple) et la démolition des maisons dans le village bédouin d’Al-Arakib (et pas dans les avant-postes des colons) ne sont que deux exemples de cette démarche. Au lieu de voir traiter les problèmes qui font monter la crise du logement pour les Bédouins et les crimes à Lod, nous ne voyons que l’emploi de la force, la bonne méthode pour traiter les Arabes.

Personne n’exprimerait une telle aversion pour la députée Hanin Zuabi (qui était à bord de la flottille en route pour Gaza) si elle n’était une Arabe. La seule raison au lancement de la loi sur la loyauté - et sur le jour de commémoration pour les victimes tuées par la police lors des troubles d’octobre 2000 - et aux visites provocatrices des députés dans Silwan, village arabe contigu à la vieille ville de Jérusalem, leur seule raison, c’est de s’en prendre une nouvelle fois aux Arabes. Nous allons leur empoisonner la vie, leur faire de mauvaises choses, et pire ce sera pour eux, mieux ce sera pour nous. Ça vous parait simpliste? Ça l’est, mais tout le reste n’a pas de sens.

La force répressive est le principal moyen utilisé par le gouvernement contre les Arabes en Israël, et contre les Palestiniens dans les territoires. La police, l’armée, le service de sécurité Shin Bet et la police des frontières sont les principaux agents d’exécution du gouvernement dans ce domaine. La droite croit que la force maintiendra l’occupation et empêchera les Arabes d’Israël de se soulever; mais par-dessus tout, elle veut leur faire du mal. Et c’est une approche pathologique. Elle n’est pas seulement générée par la haine, elle attise la haine chez ses victimes. En fin de compte, elle se réalise d’elle-même et les Arabes d’Israël se révolteront. En plus d’être amorale, cette haine ethnique est aussi pas très intelligente.

Tout ce qui reste de la doctrine initiée par Ze’ev Jabotinsky et Menachem Begin, qui comporte des éléments libéraux et démocratiques, c’est la haine. Begin s’est transformé en députée Miri Regev. Il n’y a aucun ordre du jour, aucune vision. Essayez de découvrir ce sur quoi compte la droite pour la prochaine décennie; tout ce qui lui reste, c’est son aversion pour l’Arabe. C’est cela le problème de la droite. Le problème de l’autre camp, si autre camp il y a encore, c’est qu’il n’a personne capable d’arrêter la droite.

Les manifestations de haine sont reçues avec sympathie ou indifférence, même par ceux qui devraient se tenir sur la brèche: l’opposition, les médias, les systèmes d’éducation et judiciaire.

Les dégâts que la droite nous inflige lui survivront pendant bien des années après qu’elle ait quitté les responsabilités. Il est difficile d’arracher la haine quand elle a été plantée si profondément. La droite ne peut pas nous conduire n’importe où, mais en attendant, les ordures qu’elle répand s’accumulent de plus en plus haut.

Gideon Levy
Journaliste à Ha'aretz (quotidien israélien de gauche)
18.10.10
Source: info-palestine

vendredi 29 octobre 2010

Hommage à Georges Frêche: le bal des faux-culs





Il n’y a qu’à faire le tour des médias pour mettre en lumière les véritables influences de leur rédaction.
Il n’y a qu’à faire le tour des petites phrases de femmes et d’hommes politiques pour comprendre leurs vraies aspirations, leur véritable nature comme la sincérité de leurs convictions.


Le Monde: Georges Frêche, un habitué des dérapages. Sobre, concis, sans détour sur le pire de l’homme.
Le Figaro: Merci Georges Frêche, ça réchauffait le cœur d’entendre un homme libre. Long, pompeux, sans aucun courage car une opinion citée.
L’express: Georges Frêche, le « bâtisseur » de Montpellier. Rien d’étonnant pour une rédaction qui se permet des couvertures avec «L’Occident face à l’Islam»?
20 minutes: Décès de Georges Frêche: des hommages en demi-teinte. Classique, réaliste, mesuré et prudent
Libération: Frêche fauché. Aussi court qu’incompréhensible. Frêche avait-il 18 ans? N’avait-il pas assez profité des joies de la vie? Faudrait-il le plaindre? En ces temps de flambée de cancers, beaucoup de gens, plus honnêtes, plus républicains, plus dignes, mais évidemment inconnus, auraient bien aimé vivre jusqu’à 72 ans.
François Hollande: Un bâtisseur et un visionnaire pour sa ville et sa région. Faut-il rappeler que le mort encore tiède a été viré par François Hollande lui-même du Parti Socialiste pour de multiples récidives de propos abjectes et délictueux?
Et d’ajouter: ...il était d’une grande intelligence et d’une grande sensibilité. Faire l’apologie d’un irresponsable voire d’un xénophobe et antisémite, sinon d’un tordu mou du bulbe, est-ce là une marque d’intelligence?
Martine Aubry nous remet le couvert: Un grand élu visionnaire et bâtisseur dont le nom restera à jamais lié à Montpellier et à sa région. Au-delà des désaccords que nous avons pu avoir, je souhaite me souvenir d’un homme courageux et engagé. Cela fait penser à ces illustres architectes qui se permettent de faire écrire sur une plaque de marbre, leur nom. Quel courage faut il pour dépenser l’argent public dans des grandes infrastructures? Allez-vous nous faire croire, bal de faux-culs, que toutes ces idées (orchestre philharmonique, palais des congrès, opéra, le quartier de Port-Marianne…) sont toutes venues de ses neurones? Georges Frêche a tout pensé, tout dit, tout fait pour Montpellier et sa région. A côté, Léonard De Vinci semble être un chômeur en fin de droit…
Bayrou, l’espoir déçu, le faux choix du 3è homme, le niaiseux soporifique à grandes oreilles nous lance une phrase funambulesque: Un paradoxe vivant, respecter le passé d’architecte du bonhomme sans oublier les dérapages verbaux.
Mais les commentaires ne s’arrêtent pas là, et tombent immanquablement dans l’hommage consensuel en saluant un être chaleureux et truculent.
Le plus incroyable, là-dedans, c’est que les plus lucides, les plus critiques sont… de l’UMP: Dominique Paillé va tout de même plus loin avec: On préfère se rappeler des choses positives..., un adversaire aux comportements parfois difficiles et que (l’UMP) avait souvent combattu. À l’heure où un homme part, a-t-il ajouté, on préfère se rappeler les choses positives, mais je reste convaincu que ses nombreux dérapages auront du mal à s’effacer de nos souvenirs.
Oh, que nous aimerions que le célèbre et ridicule Dodo du tandem Frédo & Dodo, soit aussi vigoureux dans sa juste dénonciation lorsque ses amis et collègues de l’UMP (Hortefeux, Besson et consors…) bavent de la même salive xénophobe. Malheureusement, seul le fait d’appartenir au clan politique adverse semble compter.

Ainsi donc, en France, le fait de décéder vous absout de tous vos péchés, aussi récents et choquants soient-ils. Un peu comme ces traditionnels préjugés: un vieux est sage, un jeune est ignare, un fonctionnaire feignant, les belles-mères toutes des vipères. Un mort mérite le respect, même s’il est une crapule.
Cela me rappelle ainsi la mort de Jorg Haider – l’équivalent du Le Pen autrichien – mort que Cpolitic ne s’était pas privé de «célèbrer». Pourquoi diantre se voiler la face? La mort d’une ordure est toujours appréciable. Est-ce à dire que le jour où Jean-Marie va faire tomber définitivement son oeil de verre, les grelots réunis du PS, UMP, Modem, Nouveau Centre et compagnie, vont oser un simple et pathétique: «un adversaire aux comportements parfois difficiles et que notre parti avait souvent combattu»?
Bandes de moules à gaufres, faux-culs, couilles molles de politiciens du PS: vous n’avez pas honte!?

Georges Frêche a créé une véritable mafia autour de sa personne. Corruption, trafic d’influence, manipulation, pressions sur les petits élus locaux, un dictateur régional qui, sous prétexte d’avoir eu de bonnes idées et de bons résultats économiques, a pu créer son petit fief, sa cour de lèches-culs, et tout ce qui s’en suit. Voyant cela, au bout de son périple politique, l’animal à la peau dure (72 ans quand même!) a cru bon d’user et d’abuser de son pouvoir pour provoquer de-ci de-là, jusqu’à franchir les limites les plus extrêmes. Le pouvoir et l’argent lui sont montés à la tête, les fidèles n’osant rien dire, n’attendant au besoin que la succession, LA place, pour être calife à la place du calife. Et puis il y a sûrement des budgets colossaux, un trésor de guerre à la clé.

Seul le MRAP s’est offusqué justement de ce bal des hypocrites, rappelant au passage que Frêche avait «commis dans sa carrière des actes d’une extrême gravité..., certaines réactions sont en décalage avec l’éthique politique». Étrangement, la Licra et la Ligue des Droits de l’Homme sont restées dans un silence coupable malgré les questions de l’AFP.
Mais au PS, comme les autres partis politiques, on préfère passer l’éponge, maintes et maintes fois, car du moment que l’individu remporte des élections, le reste n’est que pacotille. Au diable, les valeurs de la République! (...)

Malheureusement son histoire politique et ses relations ambiguës avec tous les extrêmes font penser à un homme manipulateur au possible, bouffant littéralement «à tous les râteliers» pour conserver son pouvoir local et régional. Une sorte d’André Santini capable d’être tolérant dans le simple intérêt de son business et sa réélection. Est-ce là le modèle d’un élu de la République?

Un parrain ça se protège.
Ainsi pour les propos ignobles à l’encontre des harkis, in fine, sieur Frèche a écopé de… la relaxe de la Cour d’appel de Montpellier confirmé, et c’est le comble, par la Cour de cassation!
Mais quand il accuse les flics commandés par un certain Sarkozy d’avoir participé à la casse, in fine, la condamnation se retrouve annulée en cassation, en 2008. Vraie ou pas vraie, sans preuve, cela s’appelle de la diffamation pure et simple, et venant d’un élu, ce genre de comportement est intolérable.
Mais bizarrement, l’intéressé demeure intouchable juridiquement. Etait-ce en raison de ses amitiés avec les francs-maçons?
Pourquoi François Hollande comme Martine Aubry emploient le terme étrange de «bâtisseur» pour lui rendre hommage et ce malgré leurs propres conflits avec l’énergumène? Eux aussi seraient-ils francs-maçons?
Ainsi pourrait-on comprendre qu’il suffit d’être proches des francs-maçons pour se voir octroyer une protection juridique totale. Des avantages allant parfois jusqu’à l’abus de pouvoir comme a pu le combattre un certain procureur De Montgolfier, combattant les faux-frères, à Nice. Un comble pour des élus se disant républicains dans une république se voulant égalitaire.

«Mr Frêche est mort. Comme quoi la Grande Faucheuse fait parfois bien son travail…»
La provocation n’est pas le monopole du parrain Frêche.

MÀJ 27/10: Pour l’anecdote, on apprend que le seul représentant national du PS envoyé aux obsèques n’est autre que… Harlem Désir! Il semblerait que ses engagements contre le racisme soient bien éloignés dans le temps, comme sa mémoire. Quant à la sincérité de son combat politique, une telle présence a le mérite d’être claire.

C'Politique
27.10.10

Source: www.cpolitic.com/cblog

jeudi 28 octobre 2010

Chercher, encore et encore, pour tenter de comprendre… (I)

«Les jours passent et se ressemblent», entend-on parfois. Et à l’échelle de l’Histoire, les semaines, les mois et les quelques années que nous y passons ne paraissent pas représenter grand chose, sinon rien… Ainsi pourrait-on se dire: que pèse une vie face à l’humanité, face au monde, face à l’éternité? Cependant, à l’échelle humaine qui est notre mesure – et qui doit la rester – chaque jour compte. Et n’avoir des projets que sur le très long terme ne rime à rien si nous ne sommes déjà pas capables d’assurer le quotidien. Aussi, est-il peut-être utile de nous rappeler cet adage: «Si tu ne t’occupes pas de politique, sache qu’elle s’occupe de toi»

Or, à quoi assistons-nous depuis plusieurs années, sinon à une dérive lente mais inexorable, d’une société occidentale dont les politiques virent à droite, quand ce n’est pas carrément et de manière de plus en plus affirmée, à l’extrême-droite?

Les derniers évènements illustrent bien la chose: aux Pays-Bas la coalition qui dirige le pays s’est alliée avec un parti profondément raciste, et ce pays cité en exemple pour sa tolérance et son ouverture pendant des décennies semble tourner le dos à son passé; en Autriche, fief du feu xénophobe Jörg Haider l’extrême droite remporte près de 30% des votes aux dernières élections à Vienne; en France les mesures anti-sociales sont imposées de force entre expulsion de Roms, déclarations racistes de certains ministres et soutien à la politique israélienne d’apartheid; en Italie Berlusconi allié à la Ligue du Nord impulse les pires dérives à droite, jusqu’à changer les lois pour se prémunir de la justice; en Suisse le parti xénophobe UDC affiche sa stigmatisation décomplexée des minarets et de tout ce qui touche à l’islam; dans les pays nordiques pourtant réputés pour être plutôt bien orientés dans leurs politiques sociales une brèche s’est ouverte depuis l’affaire des caricatures du prophète au Danemark jusqu’aux récents scrutins en Suède; en Allemagne l’un des dirigeants du SPD (gauche  allemande, dont il s'est fait éjecter depuis) Thilo Sarrazin a publié un livre raciste à propos de l’immigration dans le pays et la chancelière A. Merkel vient de déclarer que le «modèle multiculturel avait totalement échoué»; en n’oubliant pas la Belgique dont les errances nationalistes flamandes pourraient bien mener le pays à l’implosion… Tous ces pays ayant en commun – et ce n’est pas un hasard – l’utilisation de méthodes policières dont nous pouvons voir presque chaque jour, les dérives inacceptables pour des démocraties dignes de ce nom, à l’encontre de leurs citoyens.

Pour celles et ceux qui ont su garder la mémoire du passé, le tableau devient plus qu’inquiétant. Et il convient de s’interroger sur les raisons de ce phénomène, avant d’y trouver d’éventuelles réponses. Le premier constat qui me paraît essentiel à rappeler dans cette réflexion est qu’en Europe du Nord et de l’Ouest une grande majorité de la population était arrivée à un niveau d’aisance jamais atteint dans l’histoire de nos pays. Au point de connaître, quoi de plus normal, un phénomène d’immigration intensive, tant les habitants des pays pauvres informés de notre niveau de vie par les moyens de communication modernes, rêvaient d’échapper à leur condition de vie précaire afin d’avoir leur part du gâteau. Et que, loin de nous responsabiliser, ce confort douillet nous a endormis, trop affairés à augmenter pour certains et préserver pour d’autres, notre propre bien-être. Il suffit d’un regard en arrière pour nous rappeler d’où sont partis nos parents et voir le chemin parcouru…

Mais, arrêtons-nous sur l’exemple français où la contestation populaire a pris ces derniers mois, un nouveau tournant. Que ne voit-on, ne lit-on, n’entend-on aujourd’hui à propos du président français, autoproclamé monarque éclairé, dans une France qui sous sa conduite, semble pourtant s’enfoncer dans les ténèbres? L’euphorie de l’élection «people» de 2007 paraît déjà bien loin et le peuple français semble – enfin – se réveiller avec une sérieuse gueule de bois. Comment cela a-t-il pu se produire, sinon par un désintérêt massif de «la chose politique» qui a dans la foulée, permis l’élection de cet insolent mondain?  Des années durant, le principal souci du citoyen a été la quête de son petit bonheur strictement personnel, au détriment de tout esprit de solidarité, alimenté en cela par des médias qui n’ont de cesse de promouvoir une vie rêvée, fantasmée, à portée de main et de tout un chacun pour autant qu’il s’y exténue pour y accéder… Le mirage de cette imposture étant résumé dans le slogan présidentiel: travailler plus, pour gagner plus! Et le troupeau s’y est précipité, tels des veaux menés à l’abattoir. Le chacun pour soi dans une société hédoniste est passé maître au détriment de tout esprit de solidarité, de reconnaissance mutuelle, de fraternité… à l’exception de quelque téléthon surmédiatisé, nouveau nombrilisme collectif en live, pour faire oublier pendant 24 heures l’égoïsme qui prévaut les 363 jours restants de l’année… Et aujourd’hui, patatras! Les acquis durement gagnés par nos aînés sont rognés au fur et à mesure par une droite alliée au grand capital, voire même contestés par un pouvoir qui ne s’embarrasse plus de mentir, tricher, camoufler, et travestir les réalités pour qu’émerge le fruit de son idéologie détestablement brune.

Faut-il s’en étonner? Je pense hélas que non. Et me rends compte combien tout cela était prévisible, dès lors qu’en lieu et place d’informer, d’éduquer, d’amener le citoyen à «la chose politique», notre société des loisirs appuyée par les médias au service du pouvoir, s’évertue à le distraire, à l’étourdir et à lui raconter des histoires. Tantôt belles, tantôt laides, mais des histoires. Le peuple dit-on, adore les histoires. Et on lui en raconte chaque soir à la télé et chaque semaine au cinéma. Il n’est qu’à voir l’indécence des cachets des stars et l’évènement planétaire que constituent les festivals où leur sont déroulés tapis rouges et distribués Oscars et Césars, pour bien se rendre compte des rêves qui tiennent lieu de réalités pour beaucoup… C’est d’ailleurs aussi tout le succès des religions qui se maintiennent: des histoires à dormir debout, prises non seulement pour réelles, mais pour La Vérité. Avec un grand «L» et un grand «V», de préférence.

Et ainsi, l’information n’est plus que l’ombre d’elle-même et est détournée, dévoyée, travestie au profit d’anecdotes, de sagas et de faits divers le plus souvent bien éloignés des réalités mais proches de la tromperie. Et pour des cerveaux devenus malléables à souhait, aliénés aux mythes, aux contes, aux fantasmes, et non formés, fiction et réalité se mélangent. La raison perd ses droits au bénéfice de l’émotion. Tout est désormais décliné sur la fibre émotionnelle. A l’aide d’une technologie de plus en plus performante, à la pointe des effets spéciaux, et j’en passe…  Avec la peur en toile de fond. Afin de nous faire réagir avec nos tripes, en lieu et place de nous amener à réfléchir. Et dès lors, les lendemains qui devaient chanter selon des promesses régulièrement renouvelées, sonnent faux et sont d’autant plus difficiles à vivre…

La France a élu un parvenu méprisant, un nombriliste vulgaire, mais qui a su faire vibrer la nation par des discours démagogiques et populistes. Et voici qu’elle s’éveille – mais un peu tard, dirait La Fontaine – et constate le résultat… Loin de veiller au bien-être de la population, ce Narcisse infatué n’a d’autres préoccupations que celles qui touchent à sa petite personne et aux quelques torchons qui le suivent comme son ombre, tentant ici-et-là d’essuyer ses maladresses.

En attendant, la population voit chaque jour les disparités et les injustices se multiplier. Et la révolte à propos des retraites, n’est finalement que la goutte qui a fait déborder le vase. Tous les intervenants sur la question reconnaissent que l’âge moyen des individus augmente avec le temps et les progrès de la médecine. Et acceptent le fait que travailler quelques mois de plus ne serait finalement pas le problème. En revanche, ce qu’ils refusent, c’est la manière dont la réforme des retraites est articulée. Parce qu’une fois encore, en lieu et place de gommer les injustices, cette réforme mal ficelée – de l’aveu même du gouvernement qui annonce déjà que certains points devront être rediscutés – les  alimente. Les citoyens ont donc raison de contester et de combattre cette énième dérive d’un pouvoir qui les méprise en masse, pour le bénéfice d’une poignée. Et il n’est pas bien difficile de comprendre que c’est l’accumulation des «excès» du président et de ses vassaux qui ont fini par provoquer le ras-le-bol auquel nous assistons. Les banderoles des manifestations en disent long sur la question. Et il est même étrange que cette rage ne se soit pas manifestée plus tôt, parce que les raisons ne manquaient pas! Sauf à redire encore une fois, que c’est sans doute par manque de conscience politique…

Pour terminer, il faut dire aussi que nos pays en sont arrivés à ce point-là, parce que les gauches actuelles se sont montrées incapables de proposer des alternatives vraiment crédibles. Elles n’ont pour la plupart qu’un discours soit radical, soit utopiste, soit encore peu différent de celui tenu par la droite… Et cela doit nous apprendre ceci: une chose est de contester le système que nous ne voulons pas, autre chose est d’avoir la capacité à le remplacer par un autre qui soit suffisamment convaincant et tienne la route…
Ce qu’il en reste, est donc cette conclusion: qu’il ne faudrait plus tourner le dos à "la chose politique" mais tout au contraire, qu’il faut qu’elle (re)devienne l’affaire de chaque citoyen. A ce compte-là seulement, le système politique qui ne nous convient pas pourra être transformé et devenir participatif et non plus représentatif. Nous n’aurons plus à subir les décisions, nous pourrons y participer, activement. Et où l’on voit que l’avenir est bien entre nos mains… et que nous sommes les artisans de notre propre destin.

Daniel Vanhove 
Observateur civil
Auteur
27.10.10

mercredi 27 octobre 2010

Tarnac: un révélateur du nouvel ordre sécuritaire

Un colloque s'est tenu en France, il y a quelques jours, dont le thème était:
Lois anti-terroristes, 25 ans d'exception
Tarnac: un révélateur du nouvel ordre sécuritaire

Comme ce dont il est question ne touche pas uniquement la France, il nous paraît intéressant de livrer ici, le positionnement des organisateurs de ce colloque:

L'affaire dite de Tarnac a fonctionné comme un révélateur du nouvel ordre sécuritaire: au nom de la lutte antiterroriste, l'Etat s'affranchit de principes élémentaires du droit et des zones grises apparaissent au cœur même des institutions régaliennes, dans la justice, dans la police. Des «affaires» sont instrumentalisées comme faire-valoir d'une politique aux objectifs inavoués. Cette construction d'une «terrorisation démocratique», pour reprendre l'expression d'un essayiste, s'appuie sur un arsenal législatif mis en place progressivement depuis 25 ans. Les attentats du 11 septembre lui ont donné une nouvelle légitimité avec comme matrice le «Patriot Act» qui autorisait les autorités américaines à appliquer sur leur territoire la notion de guerre préventive contre le terrorisme. Les Etats européens ont suivi peu ou prou ce modèle adoptant des lois successives en se libérant des contraintes de leur propre ordre juridique traditionnel et démocratique.

Le cas de Tarnac a montré comment en utilisant la dramatisation de situations n'ayant pas de liens évidents, la stigmatisation d'une mouvance créée de toute pièce pour l'occasion «la mouvance anarcho-autonome» en disqualifiant les acteurs de cette prétendue mouvance, en multipliant les intimidations, en exigeant des autorités policières et judiciaires une culture du résultat, on pouvait criminaliser durablement non seulement des hommes et des femmes engagés mais qui plus est leur pensée même. Nous sommes tous concernés par ce glissement progressif, sémantique, législatif, policier qui est en train de mettre en place une société de surveillance généralisée. Si la société doit évidemment répondre à la question terroriste, elle ne doit en aucun cas permettre que les outils dont elle se dote ne s'affranchissent des valeurs qui constituent les fondements de la démocratie. Lorsque l'exception devient la règle, la frontière devient ténue entre un régime démocratique et un régime autoritaire. Lorsque l'on vit dans une période de crise globale, le pouvoir, à la recherche de boucs-émissaires, a tendance à utiliser les procédures d'exception pour stigmatiser et condamner médiatiquement et socialement des groupes d'individus.

A la lumière de ce qui s'est passé dans l'affaire de Tarnac, le colloque à l'Assemblée nationale co-organisé deux ans après les faits, par des parlementaires de plusieurs sensibilités, permettra avec des intellectuels, des juristes, des grands témoins, des élus, des avocats, de faire un état des lieux, de recontextualiser l'«affaire» en la replaçant dans l'histoire des lois d'exception, et enfin d'éclairer des pistes pour que nous ne connaissions plus de telles dérives.

Le CALAS 
Comité pour l'Abrogration des Lois Antiterroristes
15.10.10
Source: fragmentsduvisible.org

mardi 26 octobre 2010

Manifestation et provocation

Le pouvoir actuel a trouvé un excellent, mais très classique moyen pour déconsidérer les manifestations qui, depuis des semaines, battent le pavé de nos villes. Usant à profusion de tout un langage adapté pour susciter l’indignation: pillards, casseurs, violents, prise d’otages, blocage… il essaie de compenser le rejet qu’il inspire aux yeux d’une opinion publique qui lui échappe, en détournant l’attention sur des évènements qu’il provoque.

L'art subtil de la provocation
De tout temps et quelle qu’ait été, la police, elle a toujours été un instrument de répression mais aussi de provocation. Provoquer c’est, pour le pouvoir, déclencher une action illégale, qu’il ne peut assumer ouvertement, qu’il attribue publiquement à l’adversaire et dont il espère le rejet par l’opinion publique.

Montrer la violence, arrêter, juger, condamner,… a une double fonction:
- punir celles et ceux qui osent
- dissuader toute action de contestation

Une action non violente, massive et qui dure est parfaitement insupportable pour le Pouvoir, surtout si elle est populaire… Il faut absolument la détourner et la dénaturer. C’est là qu’intervient la provocation.

La provocation policière c’est, utiliser soit des membres de la police «déguisés» en manifestants (vous en avez un excellent exemple par la photo ci-dessus) et qui «agressent leurs collègues» en espérant entraîner de vrais manifestants, soit c’est s’acheter - pécuniairement - des provocateurs – non membres de la police – ou faire en sorte, en exerçant un chantage sur de petits délinquants (remises de peines, abandon de poursuites,…), qu’ils jouent le rôle de provocateurs.

Seuls les naïfs peuvent croire qu’une police qui se dit «républicaine» n’aura jamais recours à ce genre de procédé… L’Histoire - et même l’Histoire de ces derniers jours - nous éclaire abondamment sur ce dont elle est capable. Une fois la provocation accomplie, la violence consommée, le cœur des «bien- pensants» a beau jeu de jouer les vierges effarouchées devant une opinion publique qu’elle essaye de manipuler.

Provocation et violence sociale
Mais, va-t-on me dire, il n’y a pas que des provocateurs-policiers qui provoquent des incidents violents. C’est tout à fait exact!
Il est vrai que les jeunes, dits «des banlieues», exclus, méprisés, socialement désintégrés, victimes du racisme, de l’exclusion de l’emploi, traqué par les flics, victimes des contrôles au faciès, «accidentellement» renversés par la Police… qui se débrouillent comme ils peuvent pour survivre, sont tout à fait disposés à ne prendre aucun gant avec une société qui leur réserve un tel sort. Un moment de mobilisation sociale est aussi pour eux un moment d’expression qu’ils font avec «ce qu’ils savent faire»,… on peut même dire un «moment d’existence sociale». Il n’est pas question de justifier la forme de leur expression,… d’un point de vue politique, absurde,… mais d’en comprendre le sens profond,… ce qu’elle exprime,… ce à quoi se refuse le Pouvoir.

Et même si ces faits étaient – en partie, l’œuvre de ces jeunes (ce qui n’est pas toujours le cas) – quel sens y a-t-il de les présenter systématiquement comme des personnages «hors scénario» social, des «extra sociaux» qui n’appartiennent finalement pas à la société des gens ordinaires (donc «respectables»)… une manière de les «surexclure»? Jeter l’anathème sur eux c’est faire preuve d’une incompréhension totale, ou d’un refus de reconnaissance, du degré de décadence de notre société, de notre système,… car ils sont aussi un symptôme de la dégradation sociale que nous vivons aujourd’hui.

La violence policière s’articule parfaitement avec cette violence sociale, celle des exclus, des méprisés, des ghettoïsés… et les mercenaires du pouvoir ne s’y sont pas trompés quand ils se «déguisent en jeunes de banlieues» (voir la photo). La provocation policière exploite cette fracture sociale. Une fois accepté socialement, médiatiquement le terme générique de «casseur», alors on peut faire l’impasse sur l’essentiel et ne s’en tenir qu’à l’écume de la réalité sociale,… écume largement entretenue par les médias.

L'omerta sociale
De tous ces faits, que chacun peut facilement constater, rien dans les médias, rien dans la classe politique, rien dans les syndicats. Rien bien évidemment dans les organisations syndicales policières, grandes donneuses de leçon de civisme… sauf quelques rares individus que l’on fait vite taire et que l’on marginalise. Il y a comme une sorte de consensus visqueux, un «républicanisme» naïf qui attribue à la Police les valeurs – tout à fait théoriques – attribuées à la République (?). La République est devenue une sorte de mythe, dont on oublie un peu rapidement qu’elle «couvre» et légitime un système d’exploitation, d’exclusion, et que pour se faire «respecter» elle utilise des mercenaires qui sont sa force de frappe…

Que la classe politique fasse silence sur de telles pratiques, on peut le comprendre. Parasite de la société elle a tout intérêt à ce que l’ordre actuel soit par tous moyens assuré. Mais que dire de l’attitude du bon peuple, de nous? De même que pendant des siècles il se rendait dévotement à la messe, craignait Dieu et faisait confiance au clergé, aujourd’hui il adopte la même attitude à propos de ce que l’on veut lui faire croire: il vote, croit les politiciens et est persuadé que la Police est là pour le protéger. Il va même jusqu’à être compréhensif à l’égard des «robocops» qui le brutalisent en disant qu’«ils ne font qu’obéir aux ordres»… grandeur charitable des âmes simples! Quant à ceux qui les commandent, les politiciens, il - le peuple - est prêt à revoter pour eux… ce qui se reproduit d’ailleurs à chaque élection… grandeur et servitude du masochisme!

Un tel aveuglement, entretenu par tout ce qui constitue les «faiseurs d’opinion» ne peut aboutir qu’à un désastre social, à une impasse illustrée aujourd’hui par des manifestations à répétition dont le pouvoir se fout totalement et donnant lieu à de ridicules polémiques sur les chiffres, de vaines protestations et à terme à un écœurement général générateur de… violence sociale.

Ainsi la boucle est bouclée mais… rien n’est résolu.

Patrick Mignard
24.10.10
Source: altermonde-sans-frontières

lundi 25 octobre 2010

Palestine: le débat sur la violence



Une activiste américaine m’a un jour donné un livre qu’elle avait écrit sur ses expériences vécues en Palestine. L’ouvrage, largement illustré de photos, documentait son voyage dans une Cisjordanie occupée, jalonnée de fils de fer barbelés, de checkpoints, de soldats et de chars. Il mettait aussi l’accent sur la manière dont les Palestiniens résistaient pacifiquement à l’occupation, contrairement aux représentations prévalant dans les médias reliant immanquablement la résistance palestinienne à la violence.

Plus récemment, j’ai reçu un livre glorifiant la résistance non-violente, qui faisait référence à des combattants palestiniens autoproclamés qui ont renoncé à la violence comme «convertis». Le livre donnait des détails sur plusieurs merveilleux exemples sur la façon dont ces «conversions» s’étaient produites. Apparemment, un facteur clé était la découverte que tous les Israéliens ne soutenaient pas l’occupation militaire. Les combattants avaient réalisé qu’un environnement permettant qu’Israéliens et Palestiniens travaillent ensemble serait meilleur pour les Palestiniens cherchant d’autres manières plus efficaces de libération.

Un prêtre américain m’a aussi expliqué comment la résistance non-violente atteint des proportions impressionnantes. Il m’a montré des brochures qu’il s’était procurées lors d’une visite à une association de Bethléem qui enseigne à la jeunesse les dangers de la violence et la sagesse de la non-violence. L’association et ses fondateurs organisent des séminaires et des ateliers et invitent des orateurs d’Europe et des Etats-Unis pour partager leur savoir sur le sujet avec les étudiants (réfugiés pour la plupart).

De temps en temps, un article, une vidéo ou un livre font surface avec un message similaire: on enseigne aux Palestiniens la non-violence; les Palestiniens répondent positivement à l’enseignement de la non-violence.

Pour le public et les médias progressistes et de gauche, les histoires faisant l’éloge de la non-violence sont très excitantes, car elles suscitent l’espoir qu’une manière moins violente est possible, que les enseignements de Gandhi ne s’appliquent pas seulement à l’Inde, à un temps et un espace spécifiques, mais au monde entier, en tout temps.

Ces représentations invitent systématiquement à la question: où est le Gandhi palestinien? Puis vient la réponse: un Gandhi palestinien existe déjà, dans de nombreux villages de Cisjordanie en bordure du mur israélien d’apartheid qui affrontent pacifiquement les bulldozers israéliens carnivores tandis qu’ils dévorent la terre palestinienne.

Dans une déclaration marquant l’annonce de la récente visite du groupe des Anciens au Moyen-Orient, l’indienne Ela Bhatt, “avocate gandhienne de la non-violence”, a expliqué le rôle de la dernière mission des Anciens: «Je suis heureuse de revenir au Moyen-Orient pour exprimer le soutien des Anciens à tous ceux qui se sont engagés dans une résistance créative, non-violente à l’occupation – tant Israéliens que Palestiniens.»

Pour certains, l’emphase sur la résistance non-violente est une bonne stratégie médiatique. Vous aurez certainement beaucoup plus de chances d'attirer l'attention de Charlie Rose (1) en expliquant comment les Palestiniens et les Israéliens organisent des sit-ins communs qu’en parlant de la résistance armée de certains groupes militants combattant farouchement l'armée israélienne.

Pour d’autres, les convictions idéologiques et spirituelles sont les forces motrices qui sous-tendent leur implication dans la campagne de non-violence qui ferait rage en Cisjordanie. Ces réalisations semblent être largement menées par des défenseurs occidentaux.

Côté palestinien, le label non-violent est aussi utile. Il a procuré un débouché à beaucoup de ceux qui étaient impliqués dans la résistance armée, en particulier pendant la deuxième Intifada palestinienne. Quelques combattants, affiliés au mouvement Hamas par exemple, se sont tournés vers l’art et le théâtre, après avoir brandi des fusils automatiques et avoir été en tête de la liste des personnes les plus recherchées par Israël pendant des années.

D’un point de vue politique, le terme est utilisé par le gouvernement de Cisjordanie comme une plateforme qui permettrait de continuer à utiliser le mot moqawama, résistance en Arabe, mais sans s’engager dans une lutte armée coûteuse qui serait mal vue si elle était adoptée par le gouvernement actuel non élu réputé «modéré» tant par Israël que par les Etats-Unis.

Que ce soit de manière subtile ou ouverte, la résistance armée en Palestine est toujours condamnée. Le gouvernement Fatah du président Mahmoud Abbas y a fait maintes fois référence en la qualifiant de «futile». Certains disent avec insistance que c’est une stratégie contre-productive. D’autres la trouvent moralement indéfendable.

Le problème avec l’effet de contagion de la non-violence est qu’il déforme grossièrement la réalité du terrain. Il déplace aussi l’attention de la violence perpétrée par l’occupation israélienne – dans son usage routinier et mortel en Cisjordanie, et la sauvagerie indescriptible à Gaza – et la place seulement sur les épaules des Palestiniens.

Quant à la déformation grossière de la réalité, les Palestiniens ont eu recours depuis des générations à la résistance non-violente de masse – depuis la grande grève de 1936. La résistance non-violente a été et continue d’être le cœur de la moqawama palestinienne, depuis l’époque du colonialisme britannique jusqu’à l’occupation israélienne.

En même temps, quelques Palestiniens ont aussi combattu violemment, poussés par un grand sens de l’urgence et par la violence extrême perpétrée contre eux par leurs oppresseurs, de la même manière que beaucoup d’Indiens ont combattu violemment, même à l’époque où les idées du Mahatma Gandhi étaient en plein essor.

Ceux qui réduisent et simplifient l’histoire de l’Inde de la lutte anticolonialiste font la même chose avec les Palestiniens.

Les erreurs d’interprétation de l’histoire conduisent souvent à une appréciation erronée du présent, et donc à une mauvaise prescription de l’avenir. Pour certains, les Palestiniens ne font jamais ce qu’il faut, qu’ils répondent à l’oppression sans violence, violemment, avec suspicion politique ou soumission totale. Ce sera toujours à eux d’avoir à proposer une solution et de le faire de façon créative et selon des manières qui conviennent aux sensibilités occidentales et à nos interprétations souvent sélectives des enseignements de Gandhi.

La violence et la non-violence sont des décisions essentiellement collectives qui sont façonnées et guidées par des conditions et des contextes spécifiques politiques et socio-économiques. Malheureusement, la violence de l’occupant joue un rôle considérable dans la création et la manipulation de ces conditions. Il n’est pas surprenant que le deuxième soulèvement palestinien ait été beaucoup plus violent que le premier et que la résistance violente en Palestine ait été énormément stimulée par la victoire remportée par la résistance libanaise en 2000, puis à nouveau en 2006.

Ces facteurs doivent être envisagés avec sérieux et humilité, et leur complexité doit être prise en compte avant de porter tout jugement. Aucune nation opprimée ne devrait être confrontée aux exigences auxquelles les Palestiniens le sont constamment. Il y a peut-être mille Gandhis palestiniens. Il n’y en a peut-être aucun. Et franchement, cela n’a aucune importance.

Seule l’expérience unique du peuple palestinien et sa lutte pour la liberté peuvent dire ce que les Palestiniens en tant que collectif jugent appropriés pour eux-mêmes. C’est ce qui s’est passé pour la population d’Inde, de France, d’Algérie et d’Afrique du Sud, et beaucoup d’autres nations qui ont cherché et finalement obtenu leur liberté.

Ramzy Baroud
23.10.10
Note:
(1) Journaliste américain qui anime une émission télévisée d’entretiens sur PBS, le «Charlie Rose show»
Source : Maan News      

Traduction : MR pour ISM

dimanche 24 octobre 2010

L’Amérique latine, un vivant reproche pour la gauche européenne



Quand les dirigeants européens s’intéressent à l’Amérique latine, c’est en termes de commerce et d’investissements. Au niveau des Etats, il s’agit de décrocher de grands contrats pour leurs industriels, notamment ceux de l’armement, des transports et des travaux publics. Au niveau de l’Union européenne (UE), la grande affaire du moment est de savoir si un accord de libre-échange pourra être signé avec le Mercosur [1].

Pour les négociateurs de l’UE, peu importe la couleur politique des gouvernements latino-américains dès lors qu’ils ouvrent leurs marchés aux transnationales européennes. Des marchés qui représentent environ 60 milliards d’euros par an… Une exception à cette règle toutefois: ces diplomates insistent pour qu’un chapitre d’un éventuel accord traite de la garantie des investissements. C’est le Venezuela qui est directement visé en raison des nationalisations décidées par le gouvernement de Hugo Chavez, et qui ont pourtant toutes fait l’objet d’indemnisations généreuses. La souveraineté des Etats sur leurs ressources naturelles et la maîtrise de leurs secteurs économiques stratégiques sont des notions totalement étrangères aux représentants de la Commission de Bruxelles, porte parole des lobbies industriels et financiers européens, qui négocient au nom des Vingt-Sept.

Jusque-là, rien qui puisse surprendre. Aussi bien au sein de l’UE que dans ses relations extérieures, la Commission reste dans sa logique ultra-libérale, et un accord de libre-échange avec une zone de 250 millions d’habitants constituerait pour elle un succès majeur. De même, au plan politique, nul ne s’étonnera que toute la droite européenne et la quasi totalité des grands médias manifestent une hostilité permanente à l’égard des gouvernements (Bolivie, Equateur, et surtout Venezuela) qui ont engagé des processus de profonde transformation sociale et qui, avec Cuba, sont les éléments moteurs de l’Alliance bolivarienne des peuples d’Amérique (Alba) [2].

Ce qui, en revanche, est plus difficilement compréhensible, c’est l’attitude d’une grande partie des forces se réclamant de la gauche, tout particulièrement de la social-démocratie. Au mieux, elles ne veulent pas voir ce qui se passe en Amérique du Sud [3], elles regardent ailleurs. Au pire, elles se contentent de reprendre à leur compte les campagnes de désinformation et de dénigrement dont, dans la presse écrite, El Pais en Espagne et Le Monde et Libération en France sont les principaux relais européens.

L’Amérique latine est aujourd’hui la seule région du monde où, certes de manière parfois désordonnée, des gouvernements mettent en œuvre des mesures réellement progressistes, créent les conditions de la participation populaire, rompent avec les dogmes néolibéraux, mettent le projet politique au poste de commandement et instaurent, avec l’Alba, des formes de relations internationales fondées sur la solidarité et non pas la concurrence. En bonne logique, ces expériences mériteraient d’être étudiées et soutenues par tous les mouvements de gauche en Europe. Ce n’est nullement le cas. Sans doute parce qu’elles constituent un vivant reproche pour tous ceux qui ont renoncé à changer la société autrement qu’en paroles.

Bernard Cassen
01.10.10
Source: mémoires des luttes

samedi 23 octobre 2010

Une lutte de classes implacable

La lutte des classes s’aiguise de plus en plus. La bourgeoisie montre chaque jour qui passe son visage hideux qu’elle dissimulait pendant les périodes «paisibles» à travers son idéologie véhiculée essentiellement par les grands médias qu’elle possède. Tout son discours sur le droit de grève, de manifestation, de libre circulation etc., est mis à mal par les pressions multiformes et la répression qu’elle exerce sur le mouvement social qui se déroule sous nos yeux. Plus la lutte dure dans le temps, plus cette classe devient brutale, arrogante et odieuse.

La classe dirigeante est prête à utiliser tous les moyens dont elle dispose pour écraser la contestation populaire. Elle fait feu de tout bois. Président de la République, gouvernement, députés, sénateurs, intellectuels, journalistes, experts en tout genre, policiers, CRS, la BAC etc. sont mobilisés pour venir à bout d’un mouvement, somme toute, pacifique.

Deux classes aux intérêts diamétralement opposés s’affrontent ouvertement. D’un côté des millions d’hommes et de femmes, soutenus par une large majorité de leur concitoyens, qui défendent leur pension de retraite durement acquise et refusent de travailler toujours plus longtemps pour la bourgeoisie, de l’autre, une classe minoritaire, corrompue et parasite mais disposant de tous les pouvoirs et s’accrochant à ses privilèges.

Les salariés sont prêts à sacrifier leurs maigres économies pour soutenir une lutte de longue halène: «C’est pas facile, question budget, reconnaît Gérard, cheminot. C’est même un sacré manque à gagner. Les fins de mois sont plus dures, sans aucun doute. Je me souviens, en 95, on avait eu presque un mois de grève! Là, on avait souffert…» [http://www.ladepeche.fr.] Un autre ouvrier criait à la face des journalistes qu’il allait liquider son plan d’épargne pour tenir le plus longtemps possible!

La bourgeoisie ne peut comprendre que de simples ouvriers peuvent lui tenir tête en sacrifiant des journées, voire parfois des semaines de salaires. Ses représentants au gouvernement, eux, attendent cyniquement l’essoufflement de la révolte en usant de la propagande et de la répression physique, psychologique et idéologique. Un combat inégal!

La classe dominante ne reculera devant rien pour défendre ses intérêts si le mouvement populaire perdure. Toute l’histoire des luttes de classes le montre. Déjà, elle utilise la force contre les salariés des raffineries en grève et les menace de les réquisitionner et même de les jeter en prison en cas de résistance de leur part. Elle menace les routiers de poursuites pénales s’ils continuent à bloquer les routes et les péages d’autoroute en solidarité avec leurs camarades des autres secteurs professionnels.

Le gouvernement s’est également attaqué aux lycéens qui ont rejoint le mouvement social. Un adolescent de 16 ans a été gravement blessé par un tir de flash-ball. Personne ne sait s’il va conserver son œil. Ce cas dramatique ne doit pas cacher la brutalité policière exercée sur les lycéens en lutte. Combien d’adolescents ont été matraqués, gazés, traînés au sol, gardés à vue et humiliés? Mais cette répression aveugle ne fait que renforcer la détermination d’une jeunesse, dont l’avenir reste sombre, à se battre contre un pouvoir qui la méprise.

Quelle que soit l’issue du conflit, les salariés en général et les ouvriers en particulier ont déjà gagné, non seulement sur le plan moral en se battant contre une «réforme» réellement injuste, mais surtout ils ont pris conscience que l’État, le parlement, la police, les médias etc., sont contre eux et, partant, sont au service des patrons qui les exploitent tous les jours. La lutte dans l’unité leur a permis d’identifier clairement leurs ennemis de classe et le caractère bourgeois de la démocratie. Leurs intérêts et ceux de la classe dominante sont en contradiction totale. Ce combat de classe à classe dépasse, de ce fait, le cadre syndical et devient un combat politique.

Mohamed Belaali

Addenda
Deux classes irréconciliables que tout sépare:

Ils sont les exploiteurs
Nous sommes les exploités

Ils sont les oppresseurs
Nous sommes les opprimés

Ils sont les dominants
Nous sommes les dominés

Ils sont les bourgeois
Nous sommes les prolétaires

Ils sont le capital
Nous sommes le travail

Ils ont le profit
Nous avons le salaire

Ils gagnent sans travailler
Nous travaillons sans gagner

Ils sont les parasites
Nous sommes les travailleurs

Ils sont une petite minorité
Nous sommes la grande majorité

Ils défendent la société de classes
Nous luttons pour une société sans classes

Ils sont le passé
Nous sommes l’avenir

19.10.10
Source: belaali.over-blog.com

vendredi 22 octobre 2010

Le cauchemar: les atrocités de l'invasion en Irak



«Ceux qui peuvent vous faire croire des absurdités peuvent vous faire commettre des atrocités.» François-Marie Arouet - "Voltaire" (1694-1778.)

 

J’ai cette conviction profonde que le devoir du journaliste consiste à faire des comptes-rendus, à mettre en lumière des lieux souvent sombres, à servir de voix pour ceux dont la voix, les craintes, la détresse risquent de ne pas être entendues ou révélées. Écrire à propos des émotions que l’on peut parfois sentir en faisant ce devoir est un anathème et une redondance, de toute façon. Le but du journaliste est de tenter d’attirer l’attention sur les torts, non pas de pleurnicher sur les effets qu’ils peuvent avoir. Cela relève de la vie privée et c'est précisement ce qu'elle devrait être: privée. Si les politiciens désirent se dépouiller de leur dignité et faire allusion à tout, à leur vie sexuelle, à l’utilisation de leur deuil personnel pour gagner des votes de sympathie, ceux qui possèdent une parcelle de respect de soi ne souhaitent pas les imiter. Ici, je brise mon tabou, pour une bonne raison.

Depuis plusieurs semaines j’ai à nouveau fait des recherches en profondeur sur les atrocités de l’invasion de l’Irak, exhumé l’inconcevable, fait abstraction de toute émotion et lu à propos de la terreur, de la torture, de monstrueuses cruautés, d’un insupportable mot à l’autre. J’ai ensuite revisité Fallujah [1], où des documents, l’un après l’autre, révélaient les tréfonds des dépravations les plus sombres que peut toucher le «fils» ou la fille «d’une mère quelconque». En effet, le père ou la mère d’un enfant quelconque est capable d’abattre les enfants, les bambins, les bébés des autres, de sang froid, de leur rouler dessus avec des chars d’assaut, laissant leurs restes pathétiques en pâture aux chiens errants.

Parmi les photographies observées, nombreuses étaient celles que même les enquêteurs les plus endurcis jugeaient «trop troublantes à voir». Cela n’est pas mon point de vue. Si des membres de familles ayant survécu peuvent regarder, identifier, enterrer leurs proches avec amour et respect, si des travailleurs d’urgence (lorsqu’ils n’ont pas été incinérés par les troupes étasuniennes elles-mêmes) et du personnel médical (lorsqu’il n’a pas été abattu, emprisonné, torturé ou ligoté, un sac sur la tête) peuvent photographier les corps soigneusement, noter l’heure et le lieu de leur découverte pour ensuite les numéroter, les envelopper et les conserver un certain temps avant l’inhumation, dans l’espoir que des parents viennent réclamer les corps calcinés, mutilés ou pire, les restes des dépouilles, alors il s’agit d’un devoir pour ceux qui ont une quelconque «voix» aux États-Unis et au Royaume-Uni, les pays responsables du premier génocide documenté du 21è siècle, d’y attirer l’attention, à la mémoire et en l’honneur des victimes sans voix, sans nom et non dénombrées, dans l’espoir que tôt ou tard, un recours légal s’ensuive.

En réalité, c’est la compassion qui a triomphé de tout: des corps et des visages brûlés jusqu’à en être presque méconnaissable, des cadavres éviscérés, de tous les yeux, au regard souvent fixe, lançant encore un silencieux appel à l’aide mêlé de totale stupéfaction. «On fait fuir la racaille», a écrit un marine sur son site web. «On leur a brûlé la cervelle», a écrit un autre, alors que bon nombre d’entre eux prenaient des photos de ces âmes perdues et les envoyaient à des sites porno en échange de visionnement gratuit. Et entre les occupants étasuniens (redésignés «conseillers» de manière surréaliste – même voiture, nouvelle peinture) et ce que Hussein al-Alak d’Iraq Solidarity Campaign a nommé «le gouvernement de Vichy aux passeports étrangers, imposé par les États-Unis», qui se battra pour la justice envers les Irakiens?

Par ailleurs, comme depuis 1991, cette guerre est également une guerre contre les enfants à naître, les nouveaux nés et les moins de cinq ans. En plus des cadavres, des ruines, des décombres, du sang et des membres sanguinolents, il y a les difformités: les nouveaux nés, venus au monde sans yeux, sans cerveau, avec un œil de cyclope, sans tête, avec deux têtes, sans membres ou sans doigts ou avec des doigts en trop. Un pays biblique transformé en armagédon génétique et écologique pour les générations actuelles et futures, jusqu’à la fin des temps. «Mission accomplie», a déclaré George W. Bush dans sa petite combinaison de vol ridicule, à bord de l’USS Abraham Lincoln le 1er mai 2003. «Que la liberté règne», a-t-il griffonné après les premières «élections» corrompues, meurtrières et jonchées de cadavres. Résultat: «Que le génocide commence».

Le «vice-roi» nommé par les États-Unis en Irak, J. Paul Bremer, vêtu pour le rôle, à l’hollywoodienne, dans ses ridicules bottes lacées ou bottes d’armée, dépendant de votre perception, est arrivé peu après l’invasion, croyant apparemment à la réduction de la population. Il aurait demandé quelle était la population de l’Irak et on lui aurait répondu environ vingt-cinq millions. Il aurait alors rétorqué: «Beaucoup trop, disons cinq». Mais à l’époque, il était l’homme de Kissinger Associates.

En lisant, j’écoutais les grands de ce monde au sein de divers corps légaux se demander si les événements au Congo et au Rwanda devaient être «classés» comme génocide. En juillet 2004, alors que les troupes étasuniennes s’entraînaient pour le massacre de Fallujah au mois de novembre suivant, la Chambre des représentants des États-Unis a voté à l’unanimité une résolution qualifiant la tragédie du Darfour de «génocide». Les élus ont demandé à l’administration d’envisager une action «multilatérale ou même unilatérale» pour mettre un terme à ce génocide. Hésiter à prendre des mesures proactives afin de prévenir davantage de pertes de vie était selon eux «criminel».

De nos jours, les génocides sont selon toute apparence commis uniquement par des Africains ou des Européens de l’Est, non par ces grands bastions de la démocratie que sont les États-Unis, le Royaume-Uni et l’allié Israël, «la seule démocratie au Moyen-Orient». Les Forces israéliennes de défense ont entraîné des troupes étasuniennes pour le pogrom de Fallujah en novembre 2004 [2]. «Si ça bouge, tirez dessus», était l’ordre du jour. Comme lors des deux guerres mondiales, comme en Corée, au Vietnam, le visage de la libération ne change jamais.

«Leurs tactiques impliquent essentiellement une puissance de feu massive […], le recours à des chars d’assaut et des hélicoptères pour tirer sur des cibles […], la démolition d’édifices, l’installation de tireurs d’élite sur des toits, ils font des trous dans les murs [et] font feu sur tout ce qui bouge.» Cela s’ajoute aux «bombardements aériens et aux tirs d’obus provenant de gros canons de campagne». La détresse de Fallujah «[n]’était pas complètement comprise en Occident, sauf par certains survivants du ghetto de Varsovie […] [Ils étaient coincés [comme] des lapins dans un champ de maïs, encerclés pour être fauchés et démembrés par des moissonneuses-batteuses» [3]. Les photographies constituent un témoignage de cette effrayante description. Les héros méconnus sont ceux qui ont décidé d’enregistrer ces crimes pour qu’un jour, quelque part, ils soient connus et qu’une justice vengeresse soit demandée. Ces images terribles, pathétiques représentent le témoignage silencieux du premier génocide connu de l’Occident au 21è siècle. Malheureusement, il est presque certain qu’avec le temps, l’Irak et l’Afghanistan produiront davantage de preuves.

L’embargo onusien de plus de treize ans, un génocide silencieux encouragé par les États-Unis et le Royaume-Uni, interdisait à l’Irak tous les besoins de première nécessité. Les enfants mouraient de «causes liées à l’embargo», à raison d’environ six mille par mois. Lors de mes visites à cette époque, le fait d’être témoin du déchirement, de la perplexité face à leur détresse me faisait toujours sentir terriblement coupable de partir. L‘on voit et partage, dans une certaine mesure, l’inimaginable perpétré en son nom, pour ensuite partir. De l’autre côté de la frontière, en Jordanie, les lumières étaient allumés, la ville était animée, de l’eau potable coulait du robinet, et les bombes étasuniennes et britanniques ne tombaient pas. Pourtant, si près de là, les enfants mouraient, les gens mouraient, en notre nom à «Nous, le peuple …».

En regardant les photos, en lisant sur les abîmes pratiquement incompréhensibles de la destruction sadique de leurs semblables dans lesquelles peuvent sombrer uniformément des hommes et des femmes en uniformes, je pouvais du même coup m’échapper à la fin de la journée. Je pouvais me faire un repas, aller écouter un spectacle de jazz dans un de mes pub favoris ou simplement me verser un verre de vin et écouter de la musique, entourée de nombreux livres, d’une collection de photographies et d’articles que j’aime, dans une maison que j’apprécie, avant d’aller chercher la chaleur du duvet et un lit confortable.

Toutefois, si la conscience peut se fermer, de toute évidence, le subconscient ne le peut pas. Une nuit, le cauchemar, qui n’était certes pas un cauchemar, mais la réalité, m’a frappée. Dans le monde surréel des cauchemars je me suis «réveillée» pour me retrouver trempée, du sang coulant sous mes bras. En me demandant ce qui se passait et quoi faire, j’ai fait, au pays des cauchemars, ce que je fais fréquemment lorsque je tente de résoudre un problème (quoique je n’aie pas l’habitude de le faire à 3 heures du matin): j’ai rassemblé mes outils et je suis allée dans mon jardin. Comme toujours, j’ai taillé et soigné des plantes et des buissons. La plupart se sont développés à partir de petites boutures d’un quart de pouce. Elles ont été traitées aux petits soins à l’intérieur jusqu’à ce que la température soit clémente, ensuite plantées dehors dans un abri chaud, à nouveau nourries et entretenues jusqu’à ce que soudainement, comme du jour au lendemain, une extension vibrante et colorée, se tenant sur ses propres racines, soit prête à faire face à toutes les saisons. Toutefois mon jardin, avec ses haies protectrices (des fleurs blanches en été, des baies orange en hiver et des buissons épineux pour dissuader les intrus), avait disparu. Il n’y avait que des traces de bulldozer, profondes, dévastatrices, n’ayant laissé ni feuille, ni tige, ni fleur, seul un désert.

Puis, dans le monde des cauchemars, en pyjama, ensanglantée, j’ai réalisé que je n’avais pas de clés pour retourner à l’intérieur. Et si quelqu’un me trouvait dans cet état? Je me suis retournée vers la porte d’entrée afin de tenter de trouver une solution, mais l’édifice avait disparu. J’étais seule, sanguinolente, presque nue et tout avait disparu. Soudainement, en me retournant vers d’autres édifices familiers, il n’y avait plus rien, que des ruines, des décombres, une terre à l’abandon à perte de vue. Ma vie, mes livres, ma zone de confort n’existaient plus. Les vêtements ensanglantés dont j’étais vêtue étaient tout ce qui restait.

Évidemment, comme en fuite, je me suis réveillée, trempée et grelottante, avec un bain chaud, une machine à laver, un placard-séchoir chaud et plein de literie propre et mon jardin, toujours intact. Le peuple irakien, avec ses maisons, ses jardins, ses vergers, ses palmeraies ou ses plantations sur les balcons ou les toits plats, tous détruits et les Palestiniens souffrant de la même calamité, depuis soixante-deux interminables années, sans oublier les Afghans, dans leurs quartiers rasés, détruits au même titre que leurs vergers et leurs jardins de fleurs et d’abricots, ces peuples vivent un cauchemar duquel ils ne se réveillent jamais.

J’ai repensé à l’enfant irakien, dont les parents avaient un beau jardin et qui, avant l’invasion, nous avait montré, à une amie et à moi, son cahier de dessins. Un des dessins abondait de fleurs, soigneusement colorées de nombreuses teintes et, à côté, des soldats étasuniens, tirant sur elles. «Pourquoi les soldats tirent-ils sur les fleurs?», avons-nous demandé. «Parce que les Étasuniens détestent les fleurs», a-t-elle répondu solennellement. Ce fut un moment extrêmement triste: elle représentait tant d’enfants pour qui les Étatsuniens ne représentaient rien d’autre que la colère, la peur et la privation. Elle ne savait rien de ces Étasuniens qui avaient travaillé sans relâche pour renverser la situation. Si elle a survécu, elle est devenue une adulte. Il est peu probable que sa vision ait changé.

Au Royaume-Uni, le parlementaire Dr. Bill Wilson [4] s’acharne à traîner Tony Blair devant la justice. Pour servir sa cause, il a écrit au premier ministre écossais Alex Salmond et au secrétaire du ministère de la Justice Kenny MacAskill en réclamant que le corps législatif écossais adopte la définition internationale de crime d’agression, récemment approuvée. Sa lettre va comme suit:
«Plus tôt cette année, à Kampala, la Conférence d’examen du Statut de Rome par la Cour pénale internationale [5] a adopté une résolution par laquelle elle amendait le Statut afin d’inclure une définition du crime d’agression et les conditions dans lesquelles la Cour peut exercer sa compétence à cet égard. Le présent exercice de compétences sera soumis à une décision après le 1er janvier 2017 par la même majorité d’États partis, comme cela est requis pour l’adoption d’un amendement au Statut. Je crois cependant qu’en ce moment il n’existe pas d’obstacle légal pour les pays désirant inclure individuellement cette nouvelle définition de crime d’agression dans leur législation. J’espère que vous serez d’accord qu’il serait à l’honneur de l’Écosse si nous pouvions être l’un des premiers pays à le faire. Pour l’actuel gouvernement écossais, il s’agirait par ailleurs d’un bel héritage à laisser au moment où son mandat s’achève.»

Il a ajouté qu’en plus, puisque la Cour pénale internationale a approuvé une définition du crime d’agression, «[il] croit que bien que la CPI ne peut pas elle-même engager de poursuites sur cette base pour le moment, rien n’empêche les pays d’inclure immédiatement cette définition dans leur propre législation. Si l’Écosse le faisait, il servirait d’excellent exemple au reste du monde et enverrait un message clair en ce qui concerne notre respect pour le droit international. Cela encouragerait aussi fortement l’actuel gouvernement du Royaume-Uni et les suivants à réfléchir prudemment avant de se lancer dans une guerre».

«Je crois que la majorité des Écossais ne souhaite pas que la tragédie que nous avons vue se dérouler en Irak se répète. Cela pourrait être une façon de prévenir de telles aventures malavisées.» Le Dr. Wilson est catégorique: L’Écosse est en mesure de «mener sur le plan éthique en adoptant la définition de crime d’agression» et un avis juridique l’approuve. Il envisage d’utiliser Fallujah comme exemple de ce genre d’agression, mais indique également qu’il en existe sûrement de nombreux autres, lesquels ne sont pas documentés pour l’instant.

Comme le rappelle John Pilger, Tony Blair a promis que l’invasion (illégale) de Bagdad se ferait «[…] sans bain de sang et qu’à la fin, les Irakiens célébreraient […]» En réalité, la conquête criminelle de l’Irak a écrasé une société, tué jusqu’à un million de personnes, chassé quatre millions de personnes de leur maison, contaminé des villes comme Fallujah avec des poisons cancérigènes et laissé une majorité de jeunes enfants mal nourris, dans un pays autrefois décrit par l’Unicef comme un "modèle". (New Statesman, 30th September, 2010.)

Alors que le Pakistan, l’Iran, le Yémen et la Somalie semblent se trouver dans de futures visées impériales, il est certainement nécessaire d’établir un précédent qui servira de mise en garde aux chefs mal intentionnés. Le Dr Gideon Polya, qui a travaillé sur la surmortalité due aux invasions depuis 1950, déclare ceci à propos de l’Afghanistan: «Le taux de décès annuel sous l’occupation en Afghanistan est de 7 % pour les moins de 5 ans, comparativement à 4 % pour les Polonais et à 5 % pour les juifs français pendant l’occupation nazie de la Pologne et de la France.»

Les États-Unis et le Royaume-Uni, dont les chefs ont claironné les dangers d’un «nouveau Hitler» dans les pays qu’ils ont prévu anéantir, ont surpassé les nazis. Ça suffit.

Felicity Arbuthnot
09.10.10
Traduit par Julie Lévesque pour Mondialisation

Notes:
1. http://www.globalresearch.ca/index.php?context=va&aid=212121
Voir aussi : www.billwilsonmsp.org
2. "War Crime or Just War", Nicholas Wood, South Hill Press, 2005.
3. Voir 2.
4. Voir 1.
5.http://www2.icc-cpi.int/menus/icc/press%20and%20media/press%20releases/review%20conference%20of%20the%20rome%20statute%20concludes%20in%20kampala

jeudi 21 octobre 2010

La parabole des mineurs






Lorsque l'humain est interpellé dans ce qu'il a de plus sain



PLAN 1: De grandes émotions
Plus ignorés que connus, plus souvent sous terre que sur terre, plus enveloppés d’obscurité que de lumière, les voilà au centre d’une émotion et d’une solidarité qui vont au-delà des frontières, des croyances, des classes sociales. Plus d’un milliard de téléspectateurs et spectatrices ont suivi les premières heures de ce sauvetage.

Les médias ont su nous les montrer au fond des entrailles de la terre avec leur courage, leur détermination, leur discipline, leur volonté de vaincre un destin de mort et d’oubli. Ils ont tout autant permis de suivre tous ces mouvements à la surface de la mine de Sant José: les familles en état de veille permanente, les secouristes aux mille talents maniant de puissantes foreuses, et ces regards, en provenance de partout à travers le monde, tournés vers ce point minuscule du désert d’Atacama.

Avec des dizaines de millions d’humains de la terre, j’ai moi aussi pleuré devant ces scènes de grandes retrouvailles du conjoint avec sa conjointe, de l’enfant avec son père, du frère, de l’ami avec celui qu’ils croyaient ne plus jamais revoir. J’ai également ressenti comme une grande sympathie pour ce Président, multimilliardaire et ancien allié de Pinochet, qui se retrouvait comme par miracle en symbiose avec ces gens humbles, mais combien nobles et dignes. J’ai pensé un instant à la magie d’une conversion qui libère des ambitions du pouvoir et de la richesse et qui ouvre à une nouvelle fraternité, faite, celle-là, de vérité, de bonté, de justice, de solidarité allant au-delà de toutes les normes.

En somme, nous avons tous et toutes ressentis des vibrations faisant de nous des "humains".

PLAN 2: Des révélations surprenantes
Dans la grande région d’Antofagasta 277 des 300 mines en opération ne sont pas conformes aux normes dont celle de San José. Cette dernières aura été fermée en 2005, suite à un accident qui aura coûté la vie à un mineur, puis rouverte, en 2009, sans qu’il y ait eu toutefois les travaux nécessaires pour la rendre conforme aux normes de sécurité. De nombreux mineurs, ayant échappé à l’effondrement du 5 août, étaient présents sur le site du sauvetage, mais les médias n’ont pas fait écho à leurs protestations comme celle qui disait: «Arrête ton show Piñera, nous sommes aussi trois cents dehors». Ou encore ce commentaire d’un des rescapés: «San José est un cauchemar. C’était dangereux, je le savais, tout le monde le savait. Il n’y a qu’un mot d’ordre: productivité.»

Au début des années 1970, Salvador Allende, nouveau Président du Chili, avait nationalisé les principales mines du Chili pour en faire une source importante de revenus au service du peuple chilien. De nouvelles normes de sécurité, de conditions de travail, de redevances avaient, alors, été fixées. Avec le coup d’État militaire de Pinochet qui mit fin abruptement au gouvernement légitime de Salvador Allende, ces normes ont été mises aux oubliettes et les concessions faites aux initiatives privées ont été plutôt généreuses en ce qui a trait aux normes de sécurité, aux conditions de travail et aux redevances. Une révolution démocratique, plaçant les intérêts du peuple avant tous les autres, venait de connaître une fin tragique. Des milliers de morts, des dizaines de milliers de torturés et de prisonniers, près de cent mille réfugiés politiques dispersés un peu partout dans le monde. Le leader des 33 mineurs, celui qui est sorti le dernier, avait perdu son père assassiné par les milices de Pinochet, tout comme le second conjoint de sa mère, assassiné, lui aussi, et enterré dans une fausse commune.

Pendant que les médias retiennent notre attention sur la situation de ces 33 mineurs que l’on s’apprête à rescaper par un trou perforé dans le roc jusqu’à une profondeur de plus de 700 mètres, une trentaine de chiliens d’origine et de culture mapuches sont détenus dans trois pénitenciers au sud du Chili. Ils y ont entamé une grève de la faim qui dure depuis près de deux mois. Ils veulent attirer l’attention du monde sur le sort réservé à la nation Mapuche, sur leurs droits ancestraux relatifs aux terres sur lesquelles ils ont toujours vécu et qui, depuis la conquête, leur ont été enlevées en grande partie. Leurs luttes dans le sud du Chili visent donc à reprendre une partie de ces terres. Leur grève de la faim vise, entre autres, l’élimination de la loi, élaborée sous le régime de Pinochet, qui fait de ces militants du peuple Mapuche des terroristes devant répondre de leurs actes devant les tribunaux militaires et non les tribunaux civils.

PLAN 3: Le regard suit les réflecteurs
Nous vivons l’ère de la globalisation et les technologies de communication dont nous disposons ont la capacité de nous transporter dans tous les coins du monde: du Nord au Sud, de l’Est en Ouest, des hauteurs du ciel aux profondeurs de la terre. Ils ont également cette capacité de nous conduire au cœur de conflits, de luttes, de nous faire partager de grandes peines tout autant que de grandes joies.

Ces réflecteurs ne se déplacent pas selon les critères d’un humanisme sans cesse à la recherche de ce qui est juste, bon et vrai, mais selon les volontés de ceux qui en ont le contrôle. Eh oui, ces réflecteurs ne sont pas autonomes. Ainsi, ceux que nous appelons les «magnats» des moyens de communication évalueront chaque situation. Pour la guerre en Irak, ils serviront la cause du Président Bush, en Afghanistan celle de l’OTAN. Il y a des causes qui se situent bien au-delà de ce que nous appelons vérité et justice. En ce sens, nous pouvons nous demander pourquoi, il n’y a pas encore si longtemps, ils ont attiré l’attention du monde sur ce prisonnier cubain de droit commun, converti pour la circonstance en «prisonnier politique», mort des suites d’une grève de la faim et non sur ces 30 prisonniers politiques chiliens mapuches (car aucun n’a encore été jugé) également en grève de la faim depuis plus de 60 jours.

PLAN 4: Le discernement s’impose, la conscience veille
Le temps où l’argument qui faisait taire tous les autres était «je l’ai lu dans un livre» ou «je l’ai entendu à la radio» ou «le curé (ou toute autre autorité) l’a dit» ne tient plus la route. Il nous faut donc ouvrir d’autres fenêtres que celles de nos téléviseurs pour y voir des choses que ces derniers ne laissent pas passer. Il y a l’information alternative qui permet l’élargissement de nos horizons tout autant que la rencontre de personnes au sens critique particulièrement développé. À la toute fin nous n’avons d’autres ressources que celles de l’humain qui nous habite et de notre conscience qui veille et nous éclaire. Lors de la toute première conférence des presse les mineurs ont tenu à rappeler: "Nous ne sommes ni des artistes, ni des terroristes, mais des mineurs".

Des références de lecture qui interpellent
Sur le sauvetage des 33 mineurs au Chili:
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=21452

http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=21453

http://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2010-09-15-Mapuches

Sur la publicité des femmes contre la guerre en Afghanistan:
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=21457

Oscar Fortin
16.10.10
Source: le grand soir

mercredi 20 octobre 2010

De l'inexistence de l'Etat d'Israël en droit international

"Nul ne colonise innocemment. (…) Une nation qui colonise, une civilisation qui justifie la colonisation - donc la force - est déjà une civilisation malade, une civilisation moralement atteinte, qui, irrésistiblement, de conséquence en conséquence, de reniement en reniement, appelle son Hitler, je veux dire son châtiment."
Aimé Césaire

A l'heure où Benjamin Netanyahou sillonne la planète afin de tenter de convaincre la communauté internationale de ce qu'Israël doit être reconnu en tant qu'"Etat juif", l'Europe est appelée à mesurer les conséquences de l'émergence d'une classe de simples techniciens du droit que leur formation rudimentaire a rendus inaptes à prendre la mesure des problèmes de survie de notre civilisation que pose le Moyen-Orient.

Dans cet esprit, il faut rappeler, primo, que le droit international ne connaît pas d'Etat dont la définition se fonderait sur la religion ou la race et qu'il appartient donc à Israël de proposer au monde civilisé les critères qui permettraient aux jurisconsultes de préciser la nature d'un "Etat juif", afin d'introduire un concept soit tribal , soit de nature religieuse dans le droit des "gentes", puisque le droit international public s'appelle également le "droit des gens", le jus gentium, au sens latin de gens, la nation, le peuple; secundo, que la reconnaissance d'Israël en tant qu'Etat à laquelle Yasser Arafat s'est résigné en 1988 étant étrangère à ses compétences, l'invalidité de sa signature a ouvert la voie dans laquelle se sont engouffrés des successeurs bien décidés non seulement à collaborer avec l'occupant, mais à oublier qu'une telle décision n'a aucun fondement possible en droit international public, du simple fait qu'aucun peuple ne dispose du pouvoir absurde de parapher son propre auto-anéantissement.

Autrement dit, pour que le "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes" accède à son sens juridique, il faut que les peuples préexistent en tant que sujets de droit, donc en tant que "personnes morales", ce qui exclut que leur "liberté" puisse aller jusqu'à se rayer de la carte de leur propre chef et d'un trait de plume. On ne saurait "disposer de soi" si le "soi" en question se trouve réduit à un fantôme par le prétendu effet de la volonté d'un faux négociateur.

Dans une analyse juridique serrée, mais étrangère à l'analyse des fondements transcendantaux du droit, Mme Monique Chemillier-Gendreau, Professeur de droit international à l'université Paris-VII (Denis-Diderot) souligne qu'"aucune procédure n'a jusqu'ici ôté légalement aux Palestiniens le titre inaliénable qu'ils détiennent sur leur territoire".

Mais l'expression "jusqu'ici" présuppose qu'une telle procédure pourrait exister, autrement dit, qu'un droit déclaré inaliénable pourrait cependant se trouver légalement aliéné. Mme Chemillier-Gendreau ajoute que "l'occupation militaire et la colonisation juives de la Palestine sont illégales" et que seuls les Palestiniens "disposent d'un titre légitime, bien que la violence les ait jusqu'ici empêchés de l'exercer". [1]

Que peut bien signifier l'expression "titre légitime" si l'on ne s'interroge pas sur l'origine métaphysique du droit positif et de la notion de légitimité? Car ou bien l'adjectif "illégal" signifie qu'une proposition n'a pas d'existence juridique et qu'elle demeure étrangère à la planète mentale qu'on appelle "le droit" ou bien elle est contradictoire, ce qui revient au même, aucune science ne pouvant se fonder sur des propositions contraires à la logique supposée la soutenir.

C'est ainsi qu'une foule de jugements ou d'arrêts de simples laborantins du droit sont contradictoires en ce qu'ils croient pouvoir renier sans dommage la cohérence interne de la science juridique qu'ils invoquent pourtant dans leurs attendus ou leurs considérants; et, dans cet esprit, ils prétendent "annuler" des actes qui ne sauraient se trouver "annulés" en droit, puisqu'ils n'ont jamais existé en droit et qu'il convient de les déclarer "nuls et non avenus".

C'est ainsi que la Déclaration de 1988 est simplement "nulle et non avenue" en ce qu'elle n'a jamais débarqué dans la science juridique, du seul fait que M. Yasser Arafat ne disposait nullement du pouvoir de fonder en droit l'acte extra-juridique par nature et par définition que l'occupant lui demandait de signer. S'il est absurde d'"aliéner" un droit qu'on a proclamé "inaliénable" par définition, donc consubstantiel à l'existence spécifique d'un peuple et de conférer la légitimité à une nation inventée par un colonisateur, on comprend pourquoi Mme Golda Meir a toujours prétendu que le peuple palestinien n'existait pas, parce que cette condition est nécessaire pour qu'Israël puisse s'attribuer le statut d'un État.

Un "gouvernement" palestinien ne saurait donc pas davantage se dessaisir librement d'une certaine surface de son étendue territoriale au profit d'une masse d'immigrants débarqués sur ses arpents qu'un gouvernement français ne dispose de la capacité juridique d'offrir son sol ou une parcelle de celui-ci à une puissance étrangère. Il y faut une procédure en usage au seul profit des ambassades étrangères et que régit le Droit diplomatique.

On a pu constater l'usage abusif que les Etats-Unis en ont fait le 6 juin 2009: il a suffi que le cimetière français de Colleville-sur-mer, fût devenu à titre perpétuel un lopin de la nation américaine pour que M. Barack Obama pût inviter le Président de la République française à se rendre auprès du souverain étranger campé sur son territoire à lui soixante-cinq ans après son débarquement.

Certes, une guerre et un traité de paix peuvent se conclure par le rapt d'une portion du sol d'un État à son propriétaire; mais ce coup de force n'est jamais légitimable en droit pur et demeure toujours récusable - sinon ce serait en violation du droit international que la France aurait reconquis l'Alsace et la Lorraine par la force des armes en 1918.

Aussi, tous les traités internationaux reconnaissent-ils expressément que leur champ d'application demeure seulement de l'ordre du temporel, donc du provisoire, et n'accède en rien au statut transcendantal du droit - ce qu'exprime la formule obligatoirement ajoutée à titre de codicille contraignant à l'égard des États signataires: Rebus sic stantibus qu'il faut traduire par: "les clauses du présent traité ne sont valables que le temps que durera l'équilibre des forces actuellement en présence".

Du reste, ses propres missiles, rodomontades, pressions, massacres, corruptions de dirigeants palestiniens convainquent si peu Israël lui-même de ce que la Palestine disposerait du pouvoir souverain de légitimer l'implantation d'un État étranger et souverain sur son propre territoire que Tel-Aviv refuse à la résistance palestinienne son statut de guerre de libération nationale, statut pourtant aussi connu des historiens que celui de l'Espagne contre les Maures, qui a duré de 711 à 1492, ou celui de l'Islam contre le Royaume latin de Jérusalem, qui a duré de 1100 à 1291, ou celui du Général de Gaulle, qui n'a jamais reconnu l'ombre d'une existence juridique au Gouvernement de Vichy.

La tragique régression mentale de la civilisation européenne lui a fait abandonner l'enseignement de la philosophie du droit et même de la philosophie du droit pénal, ce qui signifie que notre malheureux continent ne dispose plus d'aucun centre de réflexion institutionnel sur les fondements philosophiques et anthropologiques du droit.

Or, un droit déclaré "inaliénable" trouvait son fondement dans le sacré, terme qui signifie séparé, du latin sacer . C'était encore sur ce modèle que la loi de 1957 sur la propriété littéraire et artistique édictait que la propriété d'un auteur sur son œuvre est inaliénable, ce qui signifiait - et signifie encore - que les éditeurs n'acquièrent jamais qu'un droit d'exploitation, donc d'usage ou d'usufruit, et toujours dans des conditions expressément convenues avec l'auteur. Mais si le droit est fondé en dernier ressort sur le sacré, c'est qu'il est lié à une philosophie de l'éthique, donc du "spirituel".

De quel prix politique payons-nous le naufrage de la pensée philosophique de l'Europe? Car le droit inaliénable dont les Palestiniens demeurent détenteurs leur donne le pouvoir de révoquer le prétendu "acquiescement" de M. Yasser Arafat, puisque cet "acquiescement" est aussi illusoire, donc nul et non avenu qu'aurait été le retrait par Rome, de sa qualité d'évêque à Mgr Gaillot. Le Saint Siège s'est vu contraint d'en faire l'évêque de Parthenia - c'est-à-dire de nulle part; mais il demeure évêque en tant que son titre est consubstantiel au sacré qui l'a oint, donc étranger au profane, transcendant au monde et "absolu", au sens latin de "solutus", détaché du temporel, dénoué, délivré.

C'est ce fondement métaphysique de la Liberté que le Général de Gaulle et le Hamas ont compris, l'un au nom d'une France transcendante au monde, l'autre au nom de la spiritualité religieuse.

Pour l'instant, la Palestine occupée est un Parthenia où Israël croit reléguer physiquement une nation palestinienne qui, dans son fondement spirituel, n'est pas corporelle - et c'est pour cela que son invisibilité et son immatérialité chasseront les corps qui prétendent usurper physiquement son statut transcendantal.

Mais Israël se trouve en position de faiblesse. Ce prétendu État est à la recherche désespérée de sa légitimation. Il est réconfortant que le Droit international et son éthique soient fondés sur le sacré; sinon il n'y aurait pas de civilisation de l'esprit et des bombes en nombre suffisant finiraient par légitimer des pseudo États à la pelle.

Aline et Manuel de Diéguez
07.10.10
Notes:
[1] http://www.monde-diplomatique.fr/1999/04/CHEMILLIER_GENDREAU/11901
Source:  alterinfo